Un “ogre” erre en Europe : les incendies en France et en Espagne mobilisent l’UE

“C’est un ogre, un monstre”. Par ces mots, le pompier Grégory Allione a exprimé à RTL sa désolation et son impuissance face aux flammes qui ont déjà dévasté plus de 50 000 hectares dans la pire vague d’incendies qui ait jamais ravagé la France. Les pompiers de première ligne sont débordés, ils sont plus de 10 000, mais ils ne sont pas assez nombreux et les moyens matériels ne sont pas suffisants. Le président Emmanuel Macron a demandé l’aide de l’Europe et la recevra : “La solidarité est en marche”, a-t-il annoncé.
Des hommes et des femmes, des véhicules et des avions d’Allemagne, de Grèce, de Pologne, de Roumanie et d’Autriche commencent à arriver sur le terrain. La Commission européenne a également coordonné l’assistance de quatre avions, deux de Grèce et deux de Suède, pour se joindre à l’effort de lutte contre l’incendie. La France est habituellement celle qui prête toutes les ressources dont elle dispose pour aider les autres pays, mais cette fois, c’est le pays qui a été touché. Les autorités accusent un “cocktail explosif” de conditions météorologiques.
Les ressources fournies par les partenaires européens serviront à renforcer le plus grand déploiement jamais réalisé en France, mais aussi à permettre à ceux qui travaillent depuis des semaines sans interruption de faire une pause. Cette assistance est arrivée par le biais de la Mécanisme de protection civilecomme l’a souligné le commissaire chargé de la gestion des crises, Janez Lenarcic. Le fonctionnaire de Bruxelles a souligné que “l’UE est totalement solidaire lorsqu’un pays est confronté à une situation d’urgence”.
Suite à une demande d’assistance via le mécanisme de protection civile 🇪🇺 de 🇨, nous avons dépêché 4 avions de nos #rescEU flotte de pompiers positionnée à 🇬 et 🇸🇪.
De plus, les équipes de pompiers de 🇩🇪, 🇵🇱, 🇦 et 🇷🇴 sont en route pour soutenir les premiers intervenants. pic.twitter.com/e3MDRHSRuy
– Janez Lenarčič (@JanezLenarcic) 11 août 2022
Le Premier ministre, Élisabeth BorneLe Parlement européen a appelé à lutter “plus que jamais” contre le changement climatique, mais aussi à faire preuve de réalisme en s’y adaptant dans la mesure où nous en subissons déjà les conséquences. Borne s’est rendu à Hostens, dans le sud-ouest, où l’incendie hors de contrôle a forcé l’évacuation de plus de 10 000 personnes. C’est de là que Grégoire Allione a décrit le feu comme une entité ayant une vie propre, insatiable, invincible.
“C’est gigantesque.”
En effet, les conditions donnent aux flammes ce dont elles ont besoin pour progresser. “Les conditions sont particulièrement difficiles. La végétation et le sol sont exceptionnellement secs (…) Il existe un risque très sérieux de nouveaux foyers”, ont averti les responsables de la lutte contre les incendies. Les températures ne baisseront pas jusqu’à dimanche. Jeudi, ils ont atteint 40 degrés Celsius dans les départements de la Gironde et des Landes, les plus durement touchés. “On se croirait en Californie, c’est gigantesque”, a déclaré le pompier Rémy Lahay à l’Agence France-Presse.
M. Borne était accompagné du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmaninqui a demandé à attendre la conclusion des enquêtes, mais qui a pointé du doigt une “origine criminelle” de la tragédie à ce stade. M. Darmanin a souligné que neuf foyers sur dix sont d’origine humaine, comme celui de l’Aveyron (sud-est), où un agriculteur a été mis en examen par la justice.
Le ministre a demandé aux entreprises et aux administrations publiques de libérer tous leurs employés de leurs tâches afin qu’ils puissent se porter volontaires. Carrefour, l’entreprise qui compte le plus de salariés dans le pays, a envoyé une circulaire à ses centres commerciaux pour qu’ils accordent des jours de congé à ceux qui sont prêts à coopérer avec les pompiers.
L’ère des méga-incendies
Borne a parlé d’adaptation au changement climatique et dans cette adaptation réside la nécessaire coopération entre les pays, la solidarité à laquelle Macron a fait allusion, comme celle que l’Espagne a prêtée et continue de prêter au Portugal cet été. C’est un phénomène à l’échelle du continent. L’Europe se retrouve désespérément à l’ère des méga-feux qui émettent davantage de CO2 et échappent aux efforts d’extinction. Les épisodes sont de plus en plus voraces et constituent un défi pour les équipes qui y font face.
Une étude publiée par Scientific Reports révèle une modification du régime des incendies sur le continent européen au cours des dernières décennies (1980 à 2020) en raison du changement climatique. Les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies, fondés sur la fréquence et la virulence des incendies de ces dernières années, suggèrent que les pays méditerranéens seront les plus touchés par cette crise.
La péninsule ibérique connaît déjà bien ces incendies et constitue, malgré elle, un banc d’essai pour aider les pays d’Europe centrale et septentrionale à s’attaquer aux incendies. En Europe centrale et septentrionale, la hausse des températures commence à alerter sur la nécessité de les renforcer et de les former. Le projet FirEUrisk (Fire Risk in the European Union), financé par Bruxelles, vise à développer une stratégie scientifique pour prévenir et répondre aux incendies de forêt en Europe, avec la participation de 39 institutions de 19 pays, dont l’Espagne.
Dans notre pays, la surface brûlée cet été s’élève à 200 000 hectares, les pires chiffres depuis 25 ans. La masse forestière brûlée au cours des dix dernières années s’élève à près de deux millions d’hectares. Au Portugal, 70 000 hectares ont brûlé entre juillet et août.